📖 L'histoire
Le Haut-Oisans est une terre d’or. On le cherchait partout, et la moindre pyrite cuivrée brillant sous une touffe d’herbe faisait crier au trésor. Mais le célèbre gisement de la Gardette, près de Bourg-d’Oisans, douchait bien souvent les espoirs placés en lui.
Pourquoi donc y a-t-il à la fois tant et si peu d’or dans le Haut-Oisans ?
La légende raconte qu’une sorcière, vivant seule dans une cabane sur le plateau d’Emparis, déroba par magie le croissant de lune — cet astre, comme chacun le sait, étant entièrement constitué du plus pur des ors.
Mais la force qui entraînait la lune était puissante ; pour tenter de la retenir, la sorcière la coinça dans une profonde crevasse entre deux rochers.
Mais le trajet de l’astre des nuits était inexorable : dès le lendemain, la lune réapparut dans le ciel, amputée d’un morceau, qui était toujours coincé, ce qui troubla fort les hommes de la terre.
À La Grave, tout le monde fut convaincu que c’était l’œuvre de la sorcière. Elle s’en vanta d’abord, avant de s’enfuir, craignant d’être brûlée vive.
Mais même le fragment de lune resté prisonnier sous terre continuait à se mouvoir vers l’ouest ; partout où il passait, il laissait dans la roche quelques poussières de l’or pur dont il était fait.
Les habitants de La Grave se concertèrent et conclurent que seule l’eau bénite pouvait réparer le méfait. Alors, tous les curés de l’Oisans se mirent à asperger d’eau bénite les prairies verdoyantes de la région.
Ce fut à la Gardette qu’une goutte d’eau bénite atteignit enfin le morceau de lune, le délivrant de sa captivité.
Depuis ce jour, le croissant de lune fut à nouveau entier, et son passage à travers les montagnes de l’Oisans y laissa de minces filons d’or : le paradis des géologues, l’enfer des mineurs et le purgatoire des actionnaires.