Joseph Juge

Naissance / décès : inconnus — actif à Mizoën au moins en 1686 (et dans les suites administratives) Joseph Juge arrive à Mizoën au moment où le village traverse sa crise la plus profonde : l’année 1686, juste après la Révocation, quand les abjurations s’enchaînent et que la communauté commence à se vider. Originaire de La Grave, il apparaît d’abord comme un homme d’administration autant que de religion, principalement préoccupé par la récupération des sommes dues aux pauvres par des marchands : dans un village pauvre, où les fonds de charité sont une question de survie, la mainmise sur ces créances devient un enjeu de pouvoir. Le 12 juin 1686, il accompagne Monseigneur Le Camus lors de la cérémonie de conversion collective : la messe et la procession se font devant la porte du temple, l’église paroissiale étant trop petite, ce qui dit à lui seul le rapport de force démographique. Juge entre ensuite en conflit avec la communauté sur l’arrentement des biens de cure, les charges fiscales et les suppléments demandés pour les actes ; l’assemblée finit par lui louer les biens tout en conservant une marge de manœuvre financière, signe que Mizoën cherche à garder la main sur ses maigres ressources. Après la Révocation, il se qualifie de « syndic et administrateur des pauvres de l’hôpital du dit lieu » et veut récupérer un inventaire de créances évalué à 2 686 livres : au milieu de l’effondrement, il faut liquider, transférer, contrôler. Il joue aussi un rôle institutionnel en contresignant, le 26 août 1686, le mémoire d’Antoine Roux demandant un soulagement fiscal pour Mizoën. Dans les annexes, il réapparaît dans les tiraillements liés à la liquidation des biens des pauvres et aux relations avec l’hôpital de La Grave. Le regard porté sur lui est critique : il incarne, dans un moment où le village se dépeuple et où la solidarité locale se disloque, les convoitises et les tensions suscitées par la redistribution forcée des biens des pauvres.